L’obligation faite par la Wastewater Management Authority (WMA) sur des lieux de culte de payer leurs dettes auprès de l’organisme poussera-t-elle des mosquées à fermer leurs portes ? C’est ce que craignent les dirigeants de certaines mosquées depuis la correspondance de la WMA leur demandant de régler des arrières, faute de quoi leurs fournitures d’eau seraient interrompues.
La Shan e Islam Association, qui gère deux mosquées port-louisiennes, notamment les mosquées Shan e lslam et Noor e Islam et donc les arriérés s’élèveraient à quelques Rs1,2 millions est montée au créneau récemment. L’association a servi une mise en demeure à la WMA soutenant qu’en réclamant des frais aux institutions socioculturelles pour l’eau et le système de tout-à-l’égout, la WMA commet une infraction à la loi. « (…) The attempt to impose such charges on the mosques and other religious societies and other associations is a breach of their constitutional rights under Section 13 of the Constitution of Mauritius… », peut-on lire dans le document présenté à la presse par Me Nawaz Dookhee. L’association va plus loin en soutenant qu’elle ne pourra pas gérer les deux mosquées et que de ce fait, les deux seront fermées. La mise en demeure estime que les frais exigés par la WMA sont à l’encontre des droits dont bénéficient les centres religieux et autres associations socioculturelles. Elle estime que la décision d’appliquer une charge pour le traitement des eaux usées par les centres religieux et pour ces deux mosquées est « unfair, irrational, unreasonable, badly thought and cause of unwarranted harrasments ».
La WMA avait donné un délai jusqu’au 17 septembre aux associations religieuses pour régler leurs comptes. Elle avait même évoqué des actions légales en cas de non-paiement. Le montant des dettes de l’ensemble des associations s’élève à Rs 26,3 millions. Plusieurs d’entre elles ont déjà reçu une correspondance de cet organisme. De plus, elles devront également payer les arriérés. Mais au niveau de la WMA, on souligne que la décision remonte à août 2002, soit un an après l’entrée en opération de l’organisme. Selon les chiffres de la WMA, 195 institutions sont concernées par ce paiement sur un total de 259 raccordées à la WMA. Seules 64 payent leurs factures régulièrement.
Au delà de la décision tardive de la WMA de faire des réclamations après plus de 15 ans, cette situation ramène au premier plan la légitimité de la WMA d’indexer ses tarifs sur ceux de la CWA. Il faut savoir que, selon un accord entre les deux organismes, la WMA pourra indexer ses tarifs sur ceux de la CWA. Or, comme l’a souligne dans le passe, les associations de consommateurs, une telle indexation est illogique, dans la mesure que toute l’eau consommée par un abonné n’emprunte pas le système du tout à l’égout sous la forme d’eaux usées. Faute de pouvoir initier une action en Cour, n’ayant pas de locus standi, ces associations attendaient la mise en place de la Utility Regulatory Authority pour saisir l’organisme régulateur. Il faut souligner que cette autorité est encore ne processus d’installation.
En attendant de connaitre la position de la cour sur la légitimité de la WMA de facturer les lieux de culte, il convient de faire bloc contre la méthodologie de facturation de cet organisme. A suivre.
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Coupure d’eau illégale… en France
En France, il est interdit d’interrompre al fourniture d’eau d’un abonné. Cette décision, prise par le Conseil constitutionnel, entérine la loi de 2013 qui avait alors été contestée par le distributeur Saur, donnant lieu à près de deux années de bataille devant la justice. L’entreprise avait en effet déposé une question prioritaire de constitutionnalité (QPC) auprès du Conseil quant à cette mesure, après l’attaque en justice de l’un de ses clients chez qui une coupure d’eau avait été réalisée. Ces griefs ont donc été rejetés par l’organe constitutionnel.
Pour l’association France Libertés, qui s’était portée partie civile dans l’affaire, «cette décision est l’aboutissement d’un long combat pour le respect de la loi et de la dignité des plus démunis». Applaudissant la décision du Conseil, l’association blâme les entreprises dont elle considère qu’elles n’intègrent visiblement pas le droit à l’eau au sein de leurs préoccupations. Arguant à juste titre que l’eau «ne peut pas être traitée comme une marchandise», France Libertés a déclaré que «l’acharnement (de ces entreprises) à faire passer leurs objectifs économiques avant les droits humains doit désormais être pris en compte par les collectivités et les élus quand ils prennent des décisions relatives à la mise en œuvre de ce service public». François Brottes, le président d’alors de la commission des Affaires économiques de l’Assemblée nationale, a quant à lui également salué «une belle victoire pour les défenseurs de la dignité des plus démunis». La justice avait déjà par le passé condamné plusieurs fournisseurs, tel que Veolia Eau, pour avoir coupé l’eau plusieurs mois à des clients pour cause d’impayés. Si la dette des usagers ne payant pas leurs factures ne sera bien évidemment pas effacée, la validation de cette mesure par le Conseil constitutionnel laisse à présent place à un dispositif légal plus équilibré, permettant un accompagnement spécifique aux plus indigents.